Nos luttes ne doivent pas se laisser confiner !

Mercredi 18 mars, premier jour du confinement en France, nous nous opposions déjà au confinement et à la relégation de nos combats derrière l’intérêt général de la lutte contre le coronavirus telle que mise en place par l’État.
Dès avant le confinement, nous avions prévu une action ce jour-là devant l’annexe du ministère de l’intérieur, rue des Pyrénées, en solidarité avec les dizaines de milliers de migrant.e.s à la frontière entre la Grèce et la Turquie ou parqué.e.s dans des camps de concentration comme sur l’île de Lesbos.
Face aux intimidations de la préfecture, nous avions décidé de ne pas nous rendre au lieu prévu et de faire cette vidéo explicative à la place :

Cette action devait à la fois être un test des nouvelles conditions d’apparition publique sous l’État d’urgence et un encouragement à continuer nos luttes, malgré leur reflux imposé et accepté.

Le 21 mars, journée internationale de lutte contre le racisme devait avoir lieu la marche des solidarités. Impossible à maintenir dans ces conditions, nous tenions néanmoins à maintenir des actions pour cette journée.

Ainsi, dès 10h30, nous étions 4 militant.e.s antiracistes à nous rendre à la boulangerie « La conquête du pain » à Montreuil avec tracts, affiches, autocollants et slogans. Ce sont des dizaines de personnes qui ont pu exprimer leur solidarité avec les migrant.e.s enfermé.e.s en CRA ou dans des camps à cette occasion :

https://www.facebook.com/francois.mailloux.9/posts/10221876558805690

A 14h, nous étions 3 à Opéra, lieu de départ de la manifestation prévue et annulée :

Au même moment, des militant.e.s antiracistes faisaient une action dans le 20ème arrondissement :

Toujours au même moment, à Athènes, pour l’accueil des migrant.e.s coincé.es à la frontière, la lutte continuait également malgré le respect des mesures d’hygiène et de sécurité :

Nombreux.ses sont les camarades qui opposent des inquiétudes légitimes sur les conséquences sur les services de santé face à la poursuite de ces actions militantes.
Voilà ce que nous aimerions vous répondre à tou.tes :

C’est important dans ces moments de bascule de continuer à polémiquer malgré les désaccords politiques. Et c’est pourquoi nous vous remercions de prendre le temps de nous partager vos inquiétudes ou votre énervement quant à la poursuite d’action militantes alors que le gouvernement et les médecins nous ont bien fait comprendre qu’il fallait se confiner et réduire au strict minimum les contacts humains. À chaque nouveau.elle camarade qui exprime les symptômes, nous sommes d’avantage dégoûté.e.s et déterminé.e.s à faire payer les véritables responsables. En attendant, que chacun.e ne pouvant se permettre de s’exposer dans des conditions prenne soin de soi car on va plus que jamais avoir besoin d’être uni.e.s dans les temps qui courent.

Tout d’abord, sachez que toutes celles et ceux qui ont participé aux actions prennent la situation très au sérieux. On part du principe que cette pandémie et sa gestion par la classe dirigeante peut potentiellement faire des centaines de milliers de mort.e.s, et probablement parmi nos camarades et nos proches également. Face à ce drame, on ne sort pas dans les rues pour faire les malin.e.s, se sentir fort.e.s ou rebel.le.s mais justement parce qu’on est conscient.e.s des dangers qui pèsent sur notre classe et que ce ne sera jamais l’État qui nous en préservera. Même contre un virus qui touche a priori tout le monde, il n’y a pas de solution qui ne soit pas une solution de classe. Leur confinement n’est pas une mesure médicale absolument nécessaire pour enrayer l’épidémie (il suffit de voir la gestion du truc par la Corée du sud ou Taiwan pour s’en apercevoir), mais bien une mesure politique de mise au pas de la population au nom de « l’intérêt général » (qui réunirait à égalité exploité.e.s et exploiteurs ?).

Pendant ce temps, des millions de travailleur.es continuent d’être exposé.e.s quotidiennement, toutes les grandes entreprises s’adaptent en temps réel au changement de situation pour continuer à maximiser les profits (explosion de la vente à distance, des CA de la grande distribution…), les migrant.e.s à Lesbos se voient construire des barbelés autour de la première couche de barbelé pour être sûr que le « monde extérieur » soit le moins exposé possible à ce qu’il va s’y passer, etc.

Les actions qu’on mène et continuera de mener n’ont pas lieu parce qu’il faudrait coûte que coûte maintenir le 21 mars, mais parce que la logique des frontières qui nous amenait à construire cette date est d’autant plus dangereuse avec le covid19 et la situation à la frontière de l’UE. Peu importe notre image au final, on supportera toutes les insultes et les attaques, mais on continuera à s’organiser (avec toutes les précautions possibles) pour permettre aux travailleurs d’exercer leur droit de retrait (quid du syndicaliste qui se fait expulser par les keufs parce qu’il n’a pas d’attestation employeur, c’est lui l’irresponsable ? Ou le gouvernement?), pour s’assurer que chacun et chacune ait accès aux mesures sanitaires nécessaires (ce qui passe par l’ouverture des frontières et le droit au logement, aux soins, pour tou.te.s entre autres), pour empêcher la police et les fachos de prendre le contrôle dans nos rues et sur nos vies…

Parce que contrairement à ce qu’essaye de faire le gouvernement depuis une semaine, il ne s’agit pas de responsabilités individuelles (d’ailleurs, je doute fort que quiconque covid-positif cherche à blâmer son ou sa contaminatrice), mais de notre capacité collective à se protéger.

L’antagonisme de classe ne s’est pas soudainement transformé en antagonisme entre responsables gagné.e.s au confinement et irresponsables qui veulent faire caner les vieux et les fragiles… C’est juste qu’on a trop bien appris des révolutionnaires terrassés par le fascisme ou l’autocratie pour croire au slogan « Après le coronavirus, notre tour » et qu’on peut pas se résigner à se confiner quand tant d’entre nous n’ont pas ce privilège.

Au risque de passer pour des fous, des inconscients ou des criminels parce que nous exigeons l’ouverture des frontières, nous réaffirmons la nécessité de se battre collectivement, en ces temps de coronavirus !

  • Fermeture des Centres de rétention administrative
  • Logement digne et décent pour toutes les personnes à la rue
  • Maintien des revenus de toutes et tous, CDI, CDD, intérimaires, vacataires, avec ou sans-papiers
  • Production massive de tests de dépistage et de masques de protection
  • Confinement des policiers
Gabriel Cardoen
Print Friendly, PDF & Email