Révolution au Soudan : L’armée, la réforme et la résistance par en bas

Soudan

Cet article n’a pas vocation à donner une description exhaustive des événements politiques qui ont secoué le pays ces quatre dernières années, depuis la mise en révolution du peuple soudanais en 2018. La révolution soudanaise est un exemple de révolution des plus aboutis de ces dernières années et nous permet d’analyser les dynamiques à l’œuvre dans un processus révolutionnaire. Nous tenterons de faire surgir de ces expériences révolutionnaires des constats, des leçons afin non pas de créer un dogme sur ce que doit être une révolution mais de comprendre comment elle pourrait advenir, se manifester et à quels dangers et enjeux nous devrons nous confronter.

Les Cahiers d’A2C #04 – SEPTEMBRE 2022

L’histoire coloniale du Soudan a polarisé durablement le pays entre deux réalités bien distinctes : les villes et les périphéries. Sous l’emprise coloniale de l’Angleterre, les ressources, notamment le coton et la gomme arabique étaient extraites par la force dans les périphéries rurales, acheminées dans la ville capitale de Khartoum, transformées par la main-d’œuvre urbaine, puis acheminées en Angleterre. Les campagnes vivaient alors une double-exploitation : d’une part, coloniale à travers le pillage de la production agricole envoyée en Angleterre et d’autre part de la ville-centre qui exploite les périphéries pour nourrir les ouvrier·es de Khartoum. 

Après l’indépendance en 1956, l’économie coloniale du Soudan se transforme en capitalisme d’État, où les régions périphériques du Sud sont toujours exploitées, mais en direction des grandes villes seulement. Cette dépendance des zones urbaines envers les périphéries, notamment du Sud-Soudan est une caractéristique du ­développement capitaliste du Soudan.

La distinction entre les réalités urbaines et les réalités rurales est nécessaire à l’analyse des processus révolutionnaires à l’œuvre au Soudan depuis 2018. En effet, elle permet de comprendre les disparités dans les formes de mobilisation dans les campagnes soudanaises, et dans la ville de Khartoum. Les disparités entre villes et périphéries sont un enjeu pour la révolution en cours : résoudre cette crise structurelle et unir ces deux réalités économiques, politiques et sociales distinctes entre régions rurales et régions urbaines.  Cette distinction rurales/urbaines est un outil de contrôle et de division des forces révolutionnaires, à travers un discours du gouvernement qui oppose les arabes (civilisés, urbains) aux non-arabes/africains (dangereux, ruraux). D’où l’enjeu d’un discours antiraciste de la part des révolutionnaires.

Un long processus de radicalisation 

Dans les années 1980, sous le régime militaire d’Omar El-Béchir, comme de nombreux pays d’Afrique, face à l’échec d’un développement d’État capitaliste notamment dû à la baisse du prix du coton au Soudan, le gouvernement ouvre l’économie soudanaise au marché mondial à travers des accords avec le FMI (Fond monétaire international), qui impose des réformes économiques structurelles au Soudan. L’économie agricole devient pétrolière. L’entrée de capitaux étrangers se fait notamment depuis l’Arabie saoudite qui rachète des terres dans les régions rurales par la force pour l’accès au pétrole. Avec la découverte des gisements de pétrole et des extractions depuis les pays étrangers, la situation empire pour les régions périphériques, où les résistances s’intensifient. Notamment au Darfour, où des groupes armés se soulèvent contre le gouvernement central, l’accaparement des terres, la distribution injuste des richesses. Le gouvernement use de la stratégie identitaire et attise les tensions entre les agriculteurs noirs et les éleveurs arabes en soutenant ces derniers. Cette stratégie identitaire du gouvernement permet de masquer les causes systémiques, sociales et environnementales de ces révoltes et résistances rurales. Les mouvements rebelles du Darfour s’intensifient. Pour reprendre le contrôle de la région, le gouvernement d’El-Béchir s’appuie sur des milices islamistes armées, les Janjawid, qui effectuent un réel nettoyage ethnique de la population non-arabe.

Face à la perte du Soudan du Sud, devenu indépendant, source pétrolière importante pour le gouvernement, l’économie soudanaise est en crise. De plus, l’attaque par la Cour pénale internationale contre El-Béchir à la suite du génocide du Darfour affaiblit le gouvernement militaire. Ce dernier, des plus endetté, doit faire face aux sanctions politiques et économiques internationales qui se traduisent par la suppression partielle des subventions dès 2011 (du FMI et de la Banque mondiale) mais également par la restriction du commerce lié aux hydrocarbures. Face aux attaques internationales, le discours d’El-Béchir change : désormais tout le Soudan est arabe et s’opposer à son gouvernement c’est défendre l’ingérence internationale. 

D’année en année, la politisation s’élargit : les ventes des terres aux pays du golfe entraîne l’auto-organisation des peuples autochtones, les universités touchées par les mesures d’austérité se politisent également et les grèves partielles, dans des secteurs d’habitude non mobilisés, entraînent la création de nouveaux syndicats en parallèle des syndicats institutionnels. La lutte antiraciste se déploie autour de slogans tels que « racistes arrogants, nous sommes tous du Darfour ». Face à l’intensité nouvelle de ces soulèvements, la répression s’accentue, à travers des coupures d’électricité et la réintroduction des milices Janjawid, génocidaires du Darfour.  

Le processus révolutionnaire de 2019, va adopter des méthodes d’organisation et de communication, fruit des succès et des échecs des protestations de plus en plus intenses, de 2016 à 2019. L’utilisation des médias sociaux depuis le soulèvement arabe en 2016, la présence des comités de résistance qui vont permettre la décentralisation des appels aux manifestations, et les syndicats parallèles de 2016 qui vont pouvoir appeler largement à des grèves, en sont les évolutions les plus significatives.

Il est intéressant de constater que la spontanéité des mises en révolution, comme pourrait le penser Trotski, restent à historiciser et à recontextualiser pour comprendre comment les prémices d’organisations révolutionnaires se mettent en place dans un pays. C’est presque 10 ans de résistances qui prennent part au Soudan avant la mise en mouvement de centaines de milliers de personnes dans la rue en 2019.

La révolution chasse Omar El-Béchir, la réaction se prépare

Il nous faut qualifier deux types de révolution : une révolution politique et une révolution sociale. Une révolution politique est la destitution d’un gouvernement en place, passant d’une classe dirigeante à une autre qui entraîne nécessairement des changements sociétaux mais qui doit être distinguée d’une révolution sociale qui est la fin de l’ordre social établi, aujourd’hui celui du capitalisme. Ainsi, une révolution sociale est l’abolition des classes sociales. Cependant, une révolution politique n’est pas toujours suivie d’une révolution sociale. La révolution politique est une mise en révolution en ce qu’elle active un processus révolutionnaire où la grande majorité de la population est active et mobilisée dans une volonté de changement de société.

En 2018 une contestation massive éclate dans les villes ouvrières au nord du pays, suite à l’augmentation du prix du sucre et du pain pour se généraliser à tout le pays. À partir de décembre 2018, tout le Soudan est dans la rue. Les revendications politiques sont claires : « destitution du président Omar El-Béchir, fin de la corruption et des prix élevés des produits de base ». Les manifestant·es s’unissent contre le « gouvernement de la faim ».

Une expérience révolutionnaire c’est d’abord une majorité de personnes qui se mettent en mouvement contre un système qui leur est dorénavant insupportable. C’est un point de rupture, de bascule. Mais cette mise en mouvement de la plupart, se fait spontanément, donc sans stratégie prédéfinie, ni même de projection dans ce qu’il va advenir de cette mise en mouvement. Au moment d’une mise en révolution, il s’agit, dans le présent, de l’expression massive d’un refus.

En mars 2019, l’Association des professionnels Soudanais (APS), intersyndicale créée lors des grèves des transports de 2016, appelle alors à un mouvement de désobéissance civile nationale. À la fin du mois de mai 2019, des sit-ins sont organisés autour des quartiers généraux de l’armée dans 14 villes y compris Khartoum, pour exiger une passation de pouvoir de l’armée à la direction civile de l’opposition (les Forces de la liberté et du changement, un regroupement de l’A l’Association des professionnels soudanais [APS] et des partis politiques opposés au gouvernement militaire d’El-Béchir). Une grève politique générale de deux jours est organisée pour la destitution du général et fait la preuve d’un front fort et uni derrière les demandes de la révolution. Un mois plus tard, la place d’Al-Qaïda, en face du QG de l’armée, est occupée pendant deux mois et s’y déploient des assemblées populaires, des sit-ins et une véritable réappropriation de l’espace par les militant·es. En deux jours, le 11 et 12 avril, le Soudan voit la destitution consécutive de deux généraux. Sous cette contrainte de la rue, et avec l’accord de l’Égypte et de l’Arabie saoudite, l’état- major destitue Omar El-Béchir. Il le remplace par le général Ibn Auf, ancien ministre d’El-Béchir. Le sit-in est resté en place. On y criait « tout le pouvoir au civil ». Au bout de 24 heures, la révolution venait à bout de son second dirigeant. Les militant·es refusent un gouvernement militaire. Au cœur du sit-in, les comités révolutionnaires ont mis en place des complexes proposant débat, assistance médicale, éducation populaire, distributions de provisions ou encore des services de nettoyage. 

Tout processus révolutionnaire est un processus dynamique d’accélération politique, de tensions permanentes, entre les avancées de la révolution, les forces contre-révolutionnaires et les tendances réformistes. Les avancées pour les révolutionnaires s’expriment par le renforcement de l’auto-organisation, d’élaboration de stratégies, de confiance dans sa capacité à se gouverner soi-même, de s’imaginer comme seule alternative au pouvoir mais aussi à affaiblir et combattre les forces contre-révolutionnaires dont l’État. Les forces contre-révolutionnaires quant à elles, s’organisent dans la répression, pour tenter d’isoler les éléments les plus radicaux du mouvement révolutionnaire. 

Dans la révolution soudanaise, les femmes jouent un rôle éminemment central. Elles animent le sit-in de masse qui met fin à la dictature d’El-Béchir. Puis, au mois de mai 2019, suite à une absence de garantie concernant l’opposition des femmes, elles s’organisent et contraignent la coalition de la liberté et du changement à rejeter l’accord de transition soumis par les militaires. 

Mais le 3 juin 2019 s’abat une répression sans précédent sur la place occupée qui fait 100 disparu·es, 100 blessé·es, de nombreux mort·es et viols. Ce sont des forces issues des comités de résistance qui ont protégé le sit-in et dressé des barricades. 

Cette répression colossale ouvre la voie à un nouveau chapitre de la révolution soudanaise : la consolidation des idées réformistes dans certaines franges du mouvement, notamment parmi la direction de l’APS, à travers la volonté de négocier avec les militaires pour mettre fin à l’effusion de sang. Cette nécessité de la négociation pour les intérêts de la révolution est portée par les puissances internationales au nom de la paix et le gouvernement militaire en place, la direction des forces de l’opposition voit dans ce compromis une possibilité de gouverner le pays et d’imposer des réformes progressistes pour l’amélioration de la vie des soudanais·es. De plus, elle permet de mettre fin aux massacres perpétrés par la répression face aux révolutionnaires. Ce processus se traduira par la mise en place d’un gouvernement transitoire mi-civil mi-militaire pour préparer les élections démocratiques de 2023.

Compromis par en haut ou révolution par en bas ? 

Cette mesure transitoire s’éloignant des demandes de la révolution d’un gouvernement 100 % civil, est justifiée par les différentes parties comme une situation transitoire pour aboutir aux objectifs révolutionnaires. En réalité, ce gouvernement transitoire va aboutir à un coup d’État le 25 octobre 2021. Pour comprendre l’échec du réformisme, en tant que volonté de négociation des civils avec les militaires, il s’agit de se poser les questions : ce compromis permet-il de développer la confiance des révolutionnaires dans leurs capacités d’auto-organisation et permet-il d’affaiblir les forces contre-révolutionnaires ? 

En effet, cette période transitoire n’a pas empêché l’organisation de la contre-révolution et des forces répressives. Si au départ, les forces de l’armée se trouvent obligées d’entamer des négociations avec les Forces de la liberté et du changement, très vite le pouvoir militaire, avec l’aide des forces étrangères, notamment de la France via la vente d’armes, grossit.

Du point de vue militaire, aucun changement qualitatif espéré par les révolutionnaires n’advient. Les réformes de l’appareil militaire sont laissées aux militaires eux-mêmes. La répression continue envers les manifestations, et notamment une continuation des violences dans le Darfour. Des forces de soutien rapides, les Janjawid sont intégrées au gouvernement transitoire bien qu’elle soit la milice génocidaire du Darfour. Enfin en 2020, des accords de paix se tiennent à Juba, dans le sud du Soudan, où le gouvernement transitoire intègre deux leaders rebelles du Darfour. C’est vécu comme une trahison très forte pour les Darfouris qui voient au pouvoir, la cohabitation et la collaboration des leaders rebelles et la milice génocidaire.  

Le sentiment de déception du gouvernement est partagé également dans les mobilisations urbaines. En effet, le rapport de force/le levier que possèdent les forces de l’opposition pour faire passer les réformes sociales auprès des militaires est d’actionner des mobilisations dans le pays si les réformes ne sont pas acceptées par la partie militaire. Les FLC (l’opposition) contiennent donc les poussées révolutionnaires, et les mobilisations deviennent donc un levier qu’on actionne pour la négociation. Mais les FLC n’arrivent pas à mettre toutes les réformes en place car subissent une énorme pression des militaires et des forces étrangères pour calmer la rue. Seulement, une fois que ces mobilisations s’arrêtent, les militaires peuvent décider de faire ce qu’ils veulent. Les réformes sociales et structurelles ne passent pas. Cette coalition entraîne donc d’un côté la perte de confiance progressive des soudanais·es dans les forces de l’opposition pour mettre en place les réformes et, d’autre part, ce compromis transforme les forces révolutionnaires en monnaie d’échange, suspendues aux dirigeants politiques, ce qui ne permet pas d’accroître l’auto-organisation et la confiance des révolutionnaires à être le seul pouvoir alternatif au gouvernement. Du fait des difficultés de l’opposition à transformer structurellement le Soudan, si de nombreuses libertés sont acquises pour les soudanais·es, d’un point de vue économique, la situation ne change pas tant que ça. 

Le problème fondamental de ce compromis réside dans la croyance des forces de l’opposition en la négociation. Selon la révolutionnaire soudanaise Muzan Al-Neel, la direction des forces de l’opposition sont composées de « professionnels à cols blancs ». Ces derniers, bien que convaincus par la nécessité de changement de société, et des demandes révolutionnaires, pensent que le problème du Soudan n’est pas un problème de structure mais un problème de gestion. Le Soudan est mal dirigé par les militaires, mais si ce sont les FLC, composés d’intellectuels, d’ingénieurs, de médecins, qui « gèrent » le pays, la situation économique et sociale va nettement évoluer. Les forces de l’opposition sont soutenues par les révolutionnaires, et le réformisme des Forces de la liberté et du changement n’est pas un mécanisme conscient de trahison du mouvement révolutionnaire. Sauf que le capitalisme et l’État soudanais tels qu’ils existent réellement, travaillent pour la classe dirigeante soudanaise, pour les « propriétaires » du Soudan, avec leurs mesures néolibérales, leurs banques « islamiques », leurs investissements prédateurs en provenance des pays du Golfe qui sont autant de fardeaux qui appauvrissent les paysan·es, la classe ouvrière et les classes intermédiaires du pays. De plus, leur idéal de démocratie capitaliste est totalement confortée par les puissances étrangères et partagée par la plupart des soudanais·es. 

Aussi, le mouvement révolutionnaire, perd de plus en plus la confiance du peuple soudanais et arrive d’autant moins à mettre en place ces réformes sociales face à une répression toujours aussi présente. Selon l’activiste soudanais Mohammed Abdelrahman, « Les changements politiques survenus après le renversement d’El-Béchir en avril 2019 n’ont pas réussi à affecter la dynamique sous-jacente de la crise structurelle du Soudan. »

Malgré son échec inévitable, l’expérience de la négociation permet la consolidation des idées radicales des comités de résistances, sceptiques des processus de négociation depuis le début et ainsi la radicalisation du mouvement révolutionnaire. 

Les comités de résistance détiennent les clefs de la révolution sociale

Le gouvernement transitoire n’a pas entraîné la fin de l’auto-organisation de l’activité révolutionnaire, notamment grâce aux comités de résistance. En effet, durant la période de gouvernement transitoire ces derniers ont tenté de combler, par le bas, ce que les forces de l’opposition n’ont pas réussi à transformer par le haut.

Déployés sur tout le territoire soudanais, ces derniers organisent le tissu social et culturel dans les quartiers dans lesquels ils sont implantés. Maintenant des actions offensives à travers des appels à manifestation, l’organisation de techniques contre la répression pendant les manifestations (barricades…), leurs activités se déploient également en une diversité de pratiques telles que des cérémonies de commémoration des martyrs de la révolution, la mise en place de cliniques de santé pour femmes, des conférences sur l’avenir de la démocratie au Soudan ainsi que de l’auto-formation politique. Certains comités lancent des campagnes pour améliorer directement les conditions de vie des soudanais·es, comme l’initiative de reconstruction du puits d’un village.  Chaque comité recense des dizaines de milliers de followers sur Facebook. 

Leur implantation locale et la transformation effective des réalités des soudanais·es à travers une organisation par en-bas permet aux comités de résistance de gagner la confiance des soudanais·es et de faire perdurer les revendications de la révolution. Ils profitent des acquisitions de libertés permises par le gouvernement transitoire pour s’organiser par le bas et élargir leurs influences politiques.

En octobre 2021, les comités de résistance étaient préparés au coup d’État et ont organisé des manifestations à travers tout le pays contre la prise de pouvoir des militaires. 

Les comités de résistance deviennent l’organisation révolutionnaire principale et se dote de nouvelles revendications dites des trois Non : non aux négociations, non au partenariat, non à la légitimité. Ces nouvelles revendications, plus radicales encore que celles de la révolution de 2019, viennent en quelque sorte destituer les FLC comme interlocuteurs avec les militaires, car délégitiment leur rôle qui est bien celui de la négociation et du partenariat. Ainsi, les comités de résistance viennent affaiblir l’État et les classes dirigeantes qui n’ont plus de possibles interlocuteurs pour contenir les poussées révolutionnaires. 

La révolution soudanaise est aujourd’hui désillusionnée de la possibilité de négociation avec les militaires, et d’une classe dirigeante qui trahit les intérêts de la révolution, que ce soit dans les régions urbaines ou rurales. 

Nécessité d’une stratégie révolutionnaire

Les comités de résistance sont pourtant très hétérogènes selon le profil des espaces géographiques d’où ils se déploient. Ils se contiennent dans les intérêts des espaces géographiques où ils sont implantés et non dans des intérêts de classe. Le problème étant que chaque espace géographique représente des réalités sociales bien distinctes, surtout entre les espaces urbains ou ruraux. Selon la militante Muzan Al-Neel, malgré des tentatives de coordination des comités, les capacités d’union des classes urbaines et rurales ne sont pas encore assez fortes pour permettre au mouvement révolutionnaire de répondre à la crise structurelle que traverse le Soudan, entre zones urbaines et périphéries. Pourtant cet enjeu est tout simplement nécessaire et nécessite une stratégie révolutionnaire afin d’affaiblir l’État, la classe dirigeante et ne pas risquer de laisser la révolution s’éteindre, par la trop forte répression, qui, si elle arrive à saisir les éléments les plus radicaux du mouvement révolutionnaire ou diviser les classes exploitées entre elles pourrait mettre fin au processus. 

Anouk Brunet

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