Le capitalisme peut-il se passer des frontières ?

Une caravane de migrant·e·s hondurien·ne·s traversant la rivière Suchiate entre le Guatemala et le Mexique pour rejoindre les États-Unis en octobre 2018. Au bout de ce pont grillagé, la police anti-émeute mexicaine les empêchèrent de passer.

Depuis que les êtres humains vivent sur terre, il y a toujours eu des migrations. Celles-ci n’étaient pas dépourvues de risques devant les obstacles qu’ils affrontaient. Pendant des dizaines de milliers d’années, les seules frontières qui les bloquaient étaient celles de la nature – les grandes rivières, les déserts, les chaînes de montagnes, les océans…

Aujourd’hui, les moyens de transport nous permettent de traverser voire de survoler ces obstacles sans risques. Et pourtant d’autres frontières – artificielles celles-là – construites par des hommes et strictement contrôlées, empêchent des millions de personnes de circuler librement sur cette planète. Frontières nationales, visas, contrôles de police, murs, caméras de surveillance, clôtures barbelées et électrifiées… Ce ne sont que quelques inventions barbares parmi bien d’autres qui poussent des centaines de milliers de personnes à emprunter d’autres routes – plus dangereuses – au péril de leur vie. Comment et pourquoi en est-on arrivé là ?

Les frontières construites par les hommes sont un phénomène relativement récent et pendant longtemps elles étaient souvent floues et mouvantes. En Europe, à l’époque féodale, par exemple, l’autorité des seigneurs s’exerçait sur les êtres humains plutôt que sur les territoires qui  s’étendaient ou rétrécissaient au gré des victoires, des défaites, des mariages et des alliances. Plus tard pour les Etats monarchiques absolutistes les frontières pouvaient être fortifiées afin d’empêcher les incursions des puissances rivales mais les déplacements des populations étaient peu contrôlées. Artisans, travailleurs itinérants ou pèlerins par exemple, allaient et venaient sans problème. 

C’est avec le développement du capitalisme industriel, d’abord en Angleterre puis dans le reste de l’Europe et au-delà qu’on assiste à la construction d’Etats-nations forts avec des frontières bien délimitées et surtout bien contrôlées et cela pour plusieurs raisons. 

Dans le cas de l’Etat-nation français, qui s’est construit après la Révolution française, il a fallu unifier les règles pour le commerce et les imposer sur l’ensemble du territoire national – unifier les poids et les mesures, les lois, les taxes, etc. afin de permettre le développement d’une concurrence libre entre capitaux. Il y a eu besoin d’un Etat fort aussi pour contrôler les mouvements des travailleurs « libres » – libres de leur attachement aux seigneurs féodaux et bientôt de leurs terres qu’ils seront obligés de quitter.

Petit à petit la concurrence entre capitalistes nationaux a donné lieu à une concurrence entre pays différents, entre blocs de capitaux, défendus par des Etats de plus en plus forts, de plus en plus militarisés. Ce niveau international de la concurrence pour la captation des marchés, que le révolutionnaire russe Lénine appelait « Impérialisme, stade suprême du capitalisme » se mène d’abord au niveau économique mais elle se double d’une intervention diplomatique des Etats et finit par un bras de fer militaire et la guerre pour étendre les frontières, contrôler toujours davantage de matières premières et de main d’œuvre. C’est l’histoire sanglante de la mainmise sur les colonies et plus tard des guerres impérialistes. 

Enfin, à l’intérieur de chaque pays, les capitalistes ont besoin d’un Etat fort pour casser les résistances des travailleurs devant les horreurs du capitalisme industriel avec des forces armées, la police, des tribunaux, des prisons, etc.  Cependant, la répression seule ne suffit pas pour qu’une petite minorité de la population puisse maintenir sa domination. Il y a besoin aussi de créer auprès de la majorité un consentement à sa situation d’exploitée. Et c’est là où les frontières prennent toute leur importance.

Frontières et identité nationale

Pour unifier la nation et obtenir le consentement des exploités, il faut leur faire croire qu’il existe une communauté d’intérêts entre eux et leurs exploiteurs, ce qui permet de masquer les vrais antagonismes de classe ou au moins d’atténuer leur impact.

A l’intérieur de frontières bien délimitées une identité nationale se construit par différents moyens et sur une période longue. Parmi ceux-ci, on trouve l’imposition d’une seule langue à l’école et dans la vie publique, quitte à réprimer voire à éliminer les langues régionales comme le breton, le basque ou le catalan, pour le cas de la France.

Petit à petit, et notamment à travers l’école, se construit un roman national avec la mythologie d’une France éternelle qui aurait existé depuis « nos ancêtres gaulois » jusqu’à nos jours en passant par des personnages identifiables à la nation comme Charlemagne ou Jeanne d’Arc. Le drapeau et l’hymne national font aussi partie des moyens pour créer un sentiment d’appartenance nationale et une nouvelle loyauté (à la nation) qui remplace les anciennes loyautés à l’aristocratie ou à l’église.

Image typique de propagande coloniale

Se développe ainsi un sentiment d’être différent de ceux et celles qui vivent à l’extérieur de « nos » frontières, d’être toutes et tous des compatriotes, membres de la même patrie, un sentiment tout simplement d’un « eux » et d’un « nous ». Enfin, se construit non seulement un sentiment de différence mais aussi de supériorité. Ainsi, les valeurs de la République ne sont-elles pas seulement françaises mais deviennent « universelles » et donc exportables. Quoi de mieux pour justifier les guerres coloniales et pour entraîner des milliers de soldats et de colons dans une mission « civilisatrice ». ou pour embrigader des millions de personnes dans la boucherie de la Première guerre mondiale.

Cette identité nationale et fausse fraternité entre riches et pauvres n’a rien de naturel. Pour preuve, il suffit de constater les énormes efforts que les capitalistes fournissent constamment pour les réalimenter – à l’école, dans les médias, l’hystérie autour de « nos » sportifs nationaux, « nos » hommes politiques comme Chirac, « si proches du peuple », sans parler des campagnes directes, comme le débat de Sarkozy sur l’identité nationale. 

Frontières intérieures

La construction d’une fausse unité derrière des frontières nationales permet ainsi aux capitalistes de rallier le pays contre l’ennemi extérieur mais elle aboutit aussi à la construction de frontières au sein du pays contre l’ennemi intérieur, contre celui qui est différent et qui ne serait pas vraiment français.

C’est une des armes les plus redoutables des capitalistes qui leur permet de diviser pour régner, ou comme le dit le sociologue et militant, Saïd Bouamama, « diviser ceux qui devraient être unis (les différentes composantes des classes populaires) et unir ceux qui devraient être divisés (les classes sociales aux intérêts divergents)1 Voir par exemple Bouamama, Said (2015), « L’attentat contre Charlie Hebdo : l’occultation politique et médiatique des causes, des conséquences et des enjeux ». https://bouamamas.wordpress.com/2015/01/11/lattentat-contre-charlie-hebdo-loccultation-politique-et-mediatique-des-causes-des-consequences-et-des-enjeux/..

Un des premiers à identifier comment et pourquoi cette division entre différentes sections de la classe ouvrière est entretenue était Karl Marx en parlant de l’antagonisme entre travailleurs anglais et irlandais, travaillant côte à côte. Dans un passage célèbre, il conclut :

« Cet antagonisme est artificiellement entretenu et développé par la presse, le clergé et les revues satiriques, bref par tous les moyens dont disposent les classes dominantes. Cet antagonisme est le secret de l’impuissance de la classe ouvrière anglaise, malgré son organisation. C’est le secret du maintien au pouvoir de la classe capitaliste, et celle-ci en est parfaitement consciente.2Marx Karl (1870), « L’Internationale et un pays indépendant, l’Irlande », lettre à Siegfried Mayer et August Vogt.  https://www.marxists.org/francais/marx/works/00/parti/kmpc062.htm.»

Karl Marx, 1870

Presque cinquante ans plus tard, la Première guerre mondiale nous a montré le rôle des frontières et les effroyables conséquences de la division des classes populaires – entre ouvriers et paysans français et allemands – avec des millions de morts dans les tranchées au profit des marchands de canons et autres capitalistes restés au chaud, loin du front.

Tout a été mis en place pour obtenir le consentement des soldats pour aller se faire tuer – l’amour de la patrie, la supériorité de la « démocratie » française opposée à « l’empire militariste prussien », la supériorité de l’armée républicaine et la promesse d’une victoire et d’un retour aux chaumières « avant noël ». En même temps, confrontée à la dure réalité des tranchées, cette idéologie mystificatrice n’avait qu’un impact limité et elle se doublait d’une forte coercition. Si les frontières bien délimitées servaient à empêcher l’ennemi extérieur de pénétrer sur le territoire, elles permettaient aussi d’empêcher les conscrits ainsi que les ouvriers qualifiés de sortir du pays. Et puis surtout, la coercition a été utilisé pour les réfractaires et déserteurs qui risquaient d’être emprisonnés voire fusillés.

Enfin, ce n’est pas un hasard si c’est au moment de la Première guerre mondiale que, pour la première fois, les passeports et visas ont été utilisés de manière systématique, en Europe et aux Etats Unis. Pendant la deuxième moitié du 19ème siècle, il existait un contrôle allégé mais en 1914 des contrôles stricts sont introduits de manière temporaire puis en 1919, de nouvelles lois les rendent permanents.

Contradictions

La nation, l’identité nationale et les frontières sont donc très utiles pour maintenir le contrôle d’une minorité sur un très grand nombre. Mais elles rentrent en contradiction avec d’autres besoins fondamentaux du capitalisme. Le commerce libre nécessite la libre circulation des marchandises mais aussi la disponibilité de main d’œuvre et un certain mouvement de la population.

Déjà au 19ème siècle Marx avait noté que malgré la propagande anti-irlandaise de la presse britannique, les Irlandais continuaient d’arriver en Angleterre car les capitalistes continuaient d’avoir besoin, à cette époque, de main d’œuvre supplémentaire. Depuis cette époque cela a été vrai pour tous les pays capitalistes.

L’évolution du capitalisme pendant le 20ème siècle, avec ses périodes de boom économique et de crises, illustre bien les contradictions que la question des frontières et leur contrôle posent pour les capitalistes.

Années 1920

En France par exemple les pertes énormes de soldats pendant la guerre ont abouti à un manque important de main d’œuvre dans les années 1920 au moment où l’économie redémarrait. Les femmes qui avaient remplacé les hommes dans les usines furent renvoyées à la maison pour faire des enfants et repeupler la France. En attendant, les portes se sont ouvertes pour accueillir une immigration étrangère. 

Mais il n’a fallu que quelques années et la crise économique des années 1930 pour que non seulement on ferme les frontières et qu’on arrête d’accueillir de nouveaux migrants mais qu’on commence à expulser des anciens. Des centaines de milliers de Portugais, d’Espagnols ou de Polonais sont obligés de partir, après des années en France, parfois avec le droit de n’emporter chacun que 30 kilos de bagages.

Les Trente Glorieuses

A la sortie de la Seconde guerre mondiale on assiste au boom économique le plus fort et le plus long de l’histoire du capitalisme. Cette expansion massive signifie non seulement qu’on ouvre les frontières pour accueillir une immigration étrangère mais qu’on va la chercher en installant des bureaux de recrutement en Afrique, aux Antilles et ailleurs.

A côté de cette immigration officielle il existera aussi une immigration illégale qui sera plus que tolérée. Ainsi, en mars 1966, le Ministres des affaires sociales, Jean-Marcel Jeanneney déclare : « L’immigration clandestine n’est pas inutile car, si on s’en tenait à l’application stricte des accords internationaux, nous manquerions peut-être de main d’œuvre.3Cité dans Saïd Bouamama (2019), « Planter du Blanc », p.202. » 

L’immigration « illégale » sert donc aux capitalistes pour affiner leurs besoins en main d’œuvre mais elle a aussi l’avantage pour eux d’être précaire, plus malléable et moins revendicative. En tout cas, personne à cette époque ne parlait de fermer les frontières, personne ne parlait du « fardeau » de l’immigration pour le logement ou les services publics ni d’une quelconque baisse des salaires qu’elle entraînerait. Ce sont au contraire, en grande partie, les nouveaux venus qui construisent des écoles, des hôpitaux et des centaines de milliers de logements pour tous et toutes.

Années 1970 et retour de la crise

L’année 1974 signale la fin des trente glorieuses et le début de la crise économique. Soudain le gouvernement français introduit des lois pour bloquer l’immigration et pour encourager le retour au pays. Pourtant l’immigration ne s’arrêtera pas. Et cela pour plusieurs raisons.

D’abord, certains secteurs, malgré la crise, continuent d’avoir besoin de main d’œuvre immigrée et ils sont habitués à l’arrivée régulière de main d’œuvre peu qualifiée dans des secteurs où il existe un certain turnover, comme le bâtiment, la restauration ou le travail saisonnier dans l’agriculture. D’ailleurs, ce sont loin d’être des employeurs mafieux aux marges de la société. Parmi celles qui emploient des sans-papiers, souvent par le biais de sociétés d’intérim,  on trouve de grosses entreprises du bâtiment comme Bouygues ou Eiffage mais aussi la Poste (voir la grève de Chronopost) voire des mairies comme celle de Paris.

Deuxièmement, les routes de l’immigration se sont développées depuis longtemps et ne s’arrêtent pas automatiquement.

Enfin, la crise mondiale qui ralentit la croissance dans les pays développés a un impact encore plus désastreux sur les pays du Sud avec des récessions, des famines et des guerres. Cela signifie que la pression pour émigrer pour sa propre survie et la survie de sa famille est encore plus forte qu’avant.

L’immigration illégale a donc continué, suivie à plusieurs reprises de régularisations massives en France, en Europe et au-delà.  Celles-ci se sont faites sous la pression des sans-papiers eux-mêmes et leurs soutiens mais aussi avec l’accord de certains employeurs souhaitant stabiliser leurs salariés.

Cependant, malgré les intérêts contradictoires de différents secteurs du patronat, les capitalistes et les partis politiques qui les représentent se sont largement servis du prétendu « problème » de l’immigration pour chercher à casser les résistances à leur crise. Un boulevard a ainsi été créé pour la montée des partis nationalistes et racistes de l’extrême droite. Les vaines tentatives des partis de la droite traditionnelle de les copier ou de leur faire de la surenchère sur cette question n’ont fait que renforcer « l’original ». Les partis de la gauche institutionnelle ont eux aussi contribué de manière tragique à cette dérive. De Rocard et la « misère du monde » à Valls et les Roms qui auraient « vocation à revenir en Roumanie », les tabous ont sauté et les lignes rouges ont été franchies l’une après l’autre.

Concrètement cela s’est traduit par une cascade de lois anti-immigrés4Pour un récapitulatif de ces lois, voir le dossier du « Monde » du 7 nov. 2019., une augmentation des contrôles et des expulsions et un renforcement de la surveillance des frontières.

Vers un monde sans frontières ?

Il y a trente ans, après la chute du mur et l’effondrement du bloc soviétique, certains néo-libéraux prédisaient la « « fin de l’histoire », l’avènement d’une mondialisation heureuse et la progression vers un monde sans frontières. Le monde allait désormais être ouvert à un marché libre et égal, avec la libre circulation des marchandises et des personnes. Depuis, ce rêve ne s’est pas réalisé. Au contraire, on assiste à un regain des discours protectionnistes, comme celui de Trump et un développement de partis politiques qui prônent un repli nationaliste. Certains croient encore que l’Union européenne, bien qu’imparfaite, serait une étape vers un monde sans frontières de demain. S’il est vrai que le marché unique et l’espace Schengen offrent une libre circulation des marchandises et des personnes à l’intérieur de l’UE, les frontières de l’Europe-forteresse sont contrôlées et défendues avec une férocité effroyable contre les non européens dont des dizaines de milliers sont morts pour avoir essayé de les passer. Non contents de cela, les dirigeants de l’UE ont décidé d’externaliser ces frontières, en les poussant le plus loin possible. En échange de milliards d’euros (six pour la Turquie seule) des pays, notamment d’Afrique, s’engagent à militariser leurs frontières pour empêcher leurs ressortissants de migrer. 

Le « nouvel ordre mondial » promis après la chute du mur n’existe pas. Les Etats-nations n’ont pas disparu ni perdu de leur intérêt pour les capitalistes. C’est le vieux monde qui persiste avec des capitaux qui continuent de dépendre d’un Etat ou d’un bloc d’Etats (comme l’Europe) pour mener la guerre économique aux autres5Pour une discussion des rapports entre Etat et capital, voir Harman (1991) « L’Etat et le capitalisme »  https://www.marxists.org/francais/harman/1991/etatcapital/etatcapital.htm.. Dans cette guerre, les frontières gardent toute leur importance.

Ouverture des frontières

Certains disent que les capitalistes seraient par principe pour l’ouverture des frontières, argumentant par exemple que le patronat instrumentaliserait l’immigration pour faire baisser les salaires. En fait, les capitalistes ne sont ni pour ni contre l’ouverture des frontières en principe. De manière très pragmatique, ils sont pour la possibilité de contrôler les entrées et les sorties, de les ouvrir ou de les fermer plus ou moins, en fonction de leurs intérêts, de leurs besoins. 

Les capitalistes ont besoin de frontières et en auront besoin dans l’avenir. Objectivement il n’existe qu’une seule classe ouvrière mondiale. A nous de contribuer à ce qu’elle se débarrasse des idées nationalistes et développe une conscience plus forte de ses intérêts communs.

Pour nous, cela veut dire nous battre ici en France contre le nationalisme, contre l’islamophobie et tous les racismes, en construisant les luttes de solidarité avec les migrants, en se battant avec les travailleurs sans-papiers pour l’égalité des droits.

Nous n’avons pas besoin des frontières. Nous sommes pour l’ouverture des frontières, et pour la liberté de circulation et d’installation. Les travailleurs n’ont pas de patrie.

Ross Harold
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Notes

Notes
1  Voir par exemple Bouamama, Said (2015), « L’attentat contre Charlie Hebdo : l’occultation politique et médiatique des causes, des conséquences et des enjeux ». https://bouamamas.wordpress.com/2015/01/11/lattentat-contre-charlie-hebdo-loccultation-politique-et-mediatique-des-causes-des-consequences-et-des-enjeux/.
2 Marx Karl (1870), « L’Internationale et un pays indépendant, l’Irlande », lettre à Siegfried Mayer et August Vogt.  https://www.marxists.org/francais/marx/works/00/parti/kmpc062.htm.
3 Cité dans Saïd Bouamama (2019), « Planter du Blanc », p.202.
4 Pour un récapitulatif de ces lois, voir le dossier du « Monde » du 7 nov. 2019.
5 Pour une discussion des rapports entre Etat et capital, voir Harman (1991) « L’Etat et le capitalisme »  https://www.marxists.org/francais/harman/1991/etatcapital/etatcapital.htm.